Cybercarnet du président

Un tableau qui vaut mille mots, en son 500e anniversaire

C’est au cours de la Renaissance que les plus grands chefs-d’œuvre connus de l’humanité ont été produits. J’ai admiré les yeux de La Joconde, le portrait de Mona Lisa au Louvre, j’ai contemplé Le David de Michel-Ange à Florence et je me suis émerveillé devant La Mise au tombeau de Caravage au Vatican, mon peintre de la Renaissance préféré, en passant. Pour les amateurs d’œuvres d’art, il s’agit d’une expérience semblable à l’ascension du mont Everest. L’art éveille des émotions immensément profondes.

Par ailleurs, de nombreux amateurs d’art considèrent La Transfiguration de Raphaël comme le plus grand tableau de la Renaissance. Le mois d’avril cette année marquera le 500e anniversaire de l’achèvement de ce chef-d’œuvre. Je voulais vous la présenter.

En 1516, le cardinal de Médicis, qui allait devenir plus tard le pape Clément VII, a commandé ce retable au peintre Raphaël.

Il s’agissait de la dernière œuvre et la plus grande du maître. Elle constituait son ultime tentative d’offrir la lumière de l’Évangile au monde, au milieu des ténèbres du péché et de la mort.

La transfiguration expliquée

Ce tableau décrit la magnifique scène de Jésus se baignant au clair de lune, flottant au-dessus d’une montagne (le mont Tabor selon la tradition) où les ténèbres, le mal et le désespoir apparaissent au bas du tableau.

La partie supérieure du tableau dépeint la transfiguration selon Marc 9, 12-13. La partie inférieure dépeint la tentative ratée des apôtres pour exorciser le démon qui s’était emparé d’un garçon selon Marc 9,14-29. Raphaël dépeint brillamment deux passages bibliques consécutifs, bien que distincts, qui font contraste avec le pouvoir rédempteur du Christ sur l’état de péché inhérent à l’humanité.

Pourquoi un bain au clair de lune ?

Prenons quelques instants pour mettre en relief ce que dépeint ce tableau :

Jésus, le Christ, le messie oint, vêtu d’une robe blanche, symbole de pureté, qui resplendit sous les rayons de la lune. Au temps de Raphaël, des épreuves comme le fait d’être possédé d’un démon ou être atteint d’épilepsie s’apparentaient à la lune et étaient considérées comme des maladies périodiques selon les cycles lunaires.

Moïse figure à la droite du Christ et Élie à sa gauche. À la gauche d’Élie, se tiennent deux personnages Juste et Pasteur, qui sont célébrés le même jour : soit le 6 août et partagent la même fête religieuse, la fête de la Transfiguration. Sur le sommet de la montagne, nous apercevons trois personnages prostrés : Jacques, Pierre et Jean, tous trois portant des robes aux couleurs symboliques de la foi, de l’espérance et de l’amour.

Le registre inférieur du tableau montre un paysage passablement assombri.

Au milieu et à l’extrême gauche, se tient Judas l’Iscariote ainsi que quatre apôtres : Philippe, André, Simon et Thadée. Ces derniers montrent et fixent un jeune garçon à droite. Au coin inférieur gauche du tableau se tient Matthieu vêtu d’une robe bleue. L’apôtre a également écrit le récit de la transfiguration dans Matthieu 17,1-9. Matthieu se situe à la hauteur des yeux du visiteur et sert d’interprète de cette scène. Son travail consiste à raconter ce qui s’y passe.

Matthieu, le raconteur

Les peintres de la Renaissance se sont souvent servis de ce moyen créatif pour aider les admirateurs de tableaux à en comprendre les indices. Ainsi, une main invitante montre le point saillant du tableau, une expression faciale ou un regard désapprobateur exprime un danger ou un mécontentement. Matthieu agit en raconteur, en interprète pour l’auditoire.

Il montre ce garçon, qui n’est plus prosterné ni agonisant en détresse, mais bien droit, la bouche ouverte et désignant le Christ, illustrant la fuite de l’esprit de démon.

À la gauche du garçon se tient une femme agenouillée et baignée de lumière divine. Raphaël l’a dépeinte ainsi : cette dernière prend la pose serpentine : ses épaules et ses hanches bougeant en sens opposé. Léonard de Vinci s’était servi de ce procédé dans son célèbre tableau intitulé Léda et le cygne en 1504. Le symbolisme apparenté au serpent, ainsi que les ténèbres environnantes, les autres personnages qui se contorsionnent autour d’elle, évoque une allure démoniaque.

Matthieu, le raconteur, montre cette femme qui s’agenouille humblement devant la guérison glorieuse de ce garçon possédé par un démon. Le pouvoir démoniaque ne fait pas le poids devant la puissance glorieuse du Christ transfiguré. Le garçon, libéré du démon, se tient droit et montre le Christ.

Au milieu des ténèbres surgit la lumière.

Au milieu de la déchéance surgit le salut.

Au milieu de la destruction surgit la guérison.

En hébreu, le nom de Raphaël signifie « Dieu m’a guéri ». Beaucoup de spécialistes en arts visuels s’entendent pour affirmer que Raphaël a réuni ces deux scènes (Marc 9,2-13 et Marc 9,14-29) dans cet ultime tableau, comme son testament, témoin de la puissance guérissante du Christ.

Jehovah-Rapha, le Dieu qui guérit ! Puissions-nous témoigner de l’émerveillement de Raphaël pendant que nous réfléchissons à nouveau sur l’œuvre, familière, mais combien glorieuse de notre Sauveur ressuscité. Dieu est bon.